A quoi sert une zone de gratuité ?
Les zone de gratuité ont de nombreux usages (les pratiques concrètes qu’elles permettent, ce qu’on en fait), finalités (ce qu’on souhaite en faire, ce à quoi on veut que cela serve) et formes dans leur mise en œuvre (temporaire ou non, collective ou non, discriminatoire ou non, etc.). Partant de là, chaque personne interagit différemment avec différents types de zones, et a ses propres finalités.Certains y trouveront une finalité écologique et se transformeront au fil des années en récupérateur passionné, d’autres y trouveront une finalité sociale, et seront plus enclins à donner qu’à prendre, croyant ainsi aider les personnes démunies. D’autres utilisent une zone de gratuité pour leur propre intérêt économique.
Mais, même s’il n’existe pas qu’une finalité, la légitimation des zones de gratuité, en tant que pratique sociale, suppose d’être capable d’argumenter en leur faveur, d’extérioriser la finalité subjective pour qu’elle acquiert le statut d’évidence partagée. Et, de ce point de vue, l’argumentation consiste simplement à établir et mettre en relief des liens de causalité entre la réalisation des zones de gratuité et certains objectifs attendus.
Passons donc, dans cet esprit, les principales finalités.
1) Finalité écologique.
C’est une des plus courante. Nombreux sont ceux qui trouvent une finalité écologique aux zones de gratuité. La nature de cette finalité étant de limiter l’impact non écologique (non équilibré) de l’homme sur l’environnement.
Quelle est l’hypothèse sous-jacente à cette finalité, le lien de causalité supposé ? En général, qu’une zone de gratuité favorise davantage le recyclage et le réemploi des objets qu’un système d’échanges marchands1.
L’idée centrale de cette argumentation est que l’échange marchand constitue un frein, et un coût au sens physique du terme, à la remise en circulation des objets:
- Le réemploi est limité par le prix qui constitue une barrière dans l’accès aux biens,
- Le réemploi est limité par les actes administratifs, les ressources immatérielles mobilisées, les rituels qui entourent un acte marchand et les règles de Droit, qui peuvent potentiellement créer des problèmes de responsabilité.
- Le coût physique et économique du réemploi peut être alourdi par l’ensemble des processus, dont les processus qu’on vient d’énumérer, nécessaires à leur incorporation dans un système d’échange marchand, ou pire, industriel. L’implantation de zones de gratuité locales, facilement accessibles pour ceux qui veulent déposer ou récupérer des objets paraît ici plus adaptée à un réemploi et un recyclage éthique et écologique.
- Le circuit traditionnel : achat > usage > poubelle est un puissant frein au réemploi des objets. Pour quelques raisons évidentes. D’abord, les poubelles sont bien souvent peu propices au réemploi, dans la mesure où les objets y sont jetés en vrac, donc :
- ils s’abîment les uns au contact des autres (tâches, salissures alimentaires, etc.),
- ils peuvent être potentiellement non-hygiéniques, et l’activité de récupération comprend certains risques,
- ils sont difficilement triables,
- ils sont peu transparents et repérables : sauf travail patient d’archéologue ou de récupérateur passionné, on ignore le plus souvent quel est le contenu d’une poubelle)
- ils ne sont pas valorisés (au contraire !!),
- leur récupération est rendue difficile par l’existence de freins culturels,
- ils ne sont pas centralisés, temporellement et spatialement. Ce qui implique que récupérer les objets demande une forte dépense d’énergie !
On voit donc que, sur la base de ces hypothèses, une zone de gratuité est écologiquement souhaitable sur de nombreux aspects, puisque qu’elle favorise en principe, un réemploi ou un recyclage des objets plus rapide, plus efficace, ou tout au moins, plus simple, et parce qu’elle permet de centraliser les lieux de dépôts et de récupération.
Pour finir, on pourrait rajouter d’autre arguments:
- d’abord, l’entassement des objets dans une zone renforce la prise de conscience relative à la destruction et au non-usage des objets courants,
- dans certains cas, elle peut favorises la réalisation d’activités mutuelles, de création, permettant le recyclage et un usage plus optimal des objets.
2) Finalité décroissante
Un autre aspect souvent avancé, est que les zones de gratuité coïncident avec les finalités des partisans de la décroissance. L’idée est simple et s’appuie principalement sur une hypothèse, une zone de gratuité limite potentiellement les achats et permet donc de réduire la consommation d’objets.
On peut s’interroger, d’autre part, sur
Finalité sociale
Finalité non-marchande
Finalité pratique : la multiplicité des usages
- c’est écologique (moins de production, moins de travail)
- c’est social (ça aide tout le monde à égalité)
- c’est super fun
- c’est pratique (je cherche une scie, un clou ou un peigne : je tente ma chance dans une zone de gratuité près de chez moi)
- c’est à coup sûr une belle idée que de ne plus tout faire reposer sur l’argent…
- et à quoi sert le reste ?
Une zone de gratuité ne peut pas marcher…
- qu’est-ce que marcher ?
- l’homme n’ira jamais sur la lune, c’est insensé (d’ailleurs, il n’y a jamais été…)2.
3) Quels sont les types d’objets à disposition dans une zone de gratuité ?
Tout dépend de la taille de la zone !!! Cependant, il existe quelques invariants. En ville, si l’on prend l’exemple du Café Citoyen, on y trouve à profusion :
- Des vêtements de toutes tailles, femme, homme, enfant.
- Des bouquins de genres variés : de “La grande Transformation” aux S.A.S ! BD Revues
- Inclassables : pour les récupérateurs malins
- Des bibelots, de la vaisselle, des vases, etc…
- Des petits accessoires récupérables : Bouchons de liège, Vis, Clous, Cartouches Encre, Bocaux, Poches, Sacs, Briquets, etc.
On trouve également, suivant les arrivages :
- Des graines, des plantes …
- Du mare de café
- Des pots en verre de récupération, des dizaines et dizaines de bouteilles en verre (et oui,en France, on ne les réutilise pas!)
Et la liste n’est bien sûr pas exhaustive, on va y trouver tout ce que les curieux ramènent, et tout ce que les récupérateur passionnés ramènent.
1 Ajoutons qu’il y a une hypothèse sous-jacente. Celle selon laquelle le recyclage et le réemploi sont bénéfiques d’un point de vue écologique.
2 Sous entendu : le scepticisme mal placé des gens sérieux, de ceux qui disposent d’un appui moral élevé ou d’une caution scientifique, ne vaut souvent guère mieux que celui des illuminés, des déviants…
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